Un nouvel écrin pour les vertébrés fossiles de l’Université de Poitiers

L’Université de Poitiers rassemble ses collections de vertébrés fossiles dans un même espace au sein de son unité mixte de recherche PALEVOPRIM, seule UMR de France exclusivement dédiée à l’étude de ces objets. L’université renforce ainsi sa stature internationale en paléontologie, fondée sur les travaux de cette UMR. La nouvelle infrastructure développée avec l’aide du CNRS est un outil essentiel pour la recherche, la formation des étudiants et la diffusion des connaissances vers le public.

Les collections de fossiles sont à la paléontologie ce que l’accélérateur de particules est à la physique du même nom : un équipement majeur permettant d’observer mieux et plus loin – en l’occurrence, dans le temps profond, celui de l’histoire de la biodiversité. Or si l’Université de Poitiers possède des collections de vertébrés fossiles remarquables par leur qualité et leur diversité, leur histoire complexe a fait qu’elles étaient jusqu’ici disséminées sur différents sites, rendant leur exploitation et leur valorisation difficiles.

La salle de collections du laboratoire PALEVOPRIM (UMR 7262 Paléontologie Évolution Paléoécosystèmes Paléoprimatologie), inaugurée le 18 mai 2022, permet à l’Université de Poitiers, avec l’appui du CNRS (Institut Écologie et Environnement), de rassembler ce patrimoine unique dans un même lieu de conservation et d’étude, au cœur du laboratoire. Ce travail est un partenariat avec le Centre de Valorisation des Collections scientifiques de l’Université de Poitiers (CVCU), s’inscrivant pleinement dans le cadre de sa politique menée sur le riche fond patrimonial et scientifique de l’établissement.

L’agencement de cette salle de 80 m², obtenue auprès de l’UFR Sciences Fondamentales et Appliquées, permet de regrouper au moins 15 000 spécimens originaux et reproduits découverts dans une quarantaine de sites paléontologiques internationaux, dont une part prépondérante en Région Nouvelle Aquitaine. Enfin rassemblées grâce à ce partenariat original avec le CVCU, ces collections permettent d’explorer l’histoire de la biodiversité et des environnements de cette région et au-delà, depuis le Mésozoïque (ère datée entre 251 Ma et 66 Ma – millions d’années avant nos jours) jusqu’aux périodes historiques.

Parmi les différentes collections rassemblées dans cette salle, on trouve un ensemble de crocodiliens marins datés du Jurassique, autour de 180 Ma, découvert sur le territoire de Grand Poitiers. Ces fossiles témoignent d’un monde très différent du présent, à une époque où le seuil du Poitou était un archipel baigné par une mer tropicale. Un autre élément significatif est constitué par les très nombreux fossiles de l’Éocène et de l’Oligocène du bassin aquitain, entre 35 Ma et 25 Ma, incluant au sein d’une riche biodiversité des carnivores à dents de sabres, des rhinocéros ainsi que de grands entélodontes aux mâchoires broyeuses et au crâne hérissé d’excroissances osseuses, également nommés « cochons terminator ». Ces espèces fossiles permettent d’étudier la Grande Coupure, une période de changements climatiques et géologiques majeurs ayant conduit à l’arrivée de nombreuses espèces asiatiques dans une Europe occidentale jusque-là isolée. L’étude de tels événements est une source d’enseignements pour aborder des phénomènes bien actuels – impact des changements environnementaux sur la biodiversité, espèces envahissantes et extinctions.

La constitution de ce fond important doit énormément aux travaux menés sur le terrain par les membres du laboratoire de paléontologie de l’Université de Poitiers au cours des années 1960 à 1990, notamment par Michel Beden, Odile Bœuf, Louis de Bonis, Michel Brunet, Christian Guth et Yves Jehenne. Il continue à s’enrichir aujourd’hui à la fois en spécimens originaux, en moulages et en modèles virtuels en 3D grâce aux travaux des membres de PALEVOPRIM, soulignant le lien vivant entre découvertes sur le terrain, collections et recherche. Grâce à l’installation de cette nouvelle salle au sein de PALEVOPRIM, les études menées sur ce fond, s’ouvrant dans sa totalité aux membres de l’UMR et au-delà à toute la communauté scientifique internationale, bénéficient également de l’accès aux équipements du laboratoire.

Au-delà des enjeux de la recherche et du rayonnement scientifique de l’Université de Poitiers, il s’agit d’une avancée supplémentaire et importante dans la protection et la mise en valeur du patrimoine de cet établissement. Les collections sont également accessibles aux étudiants et constituent un moyen de formation pratique particulièrement attractif. Ainsi des étudiants niveau Licence de l’université de Poitiers mais également de toute la France sollicitent des stages leur permettant de participer à l’organisation des spécimens et à l’informatisation des inventaires. Ces collections jouent également un rôle croissant dans les offres de stages de formation à la recherche au niveau master ainsi que dans des projets de recherches doctorales à l’échelle nationale. Cette salle matérialise donc de façon très concrète l’articulation entre recherche et formation au cœur de la démarche de l’Université de Poitiers.

Enfin, ces collections sont un support exceptionnel de médiation de la culture scientifique, au service de nombreuses interventions auprès du public dans le cadre d’événements nationaux (fête de la science, journées européennes du patrimoine), locaux (printemps de la recherche) ou d’interventions ponctuelles dans les établissements scolaires. Malgré la pandémie, les paléontologues de PALEVOPRIM ont déjà pu faire découvrir la nouvelle salle et son contenu à des centaines d’élèves de l’académie de Poitiers et de particuliers émerveillés. Un nouvel atout, donc, pour la politique de l’Université de Poitiers, en accord avec son programme labellisé « science avec et pour la société » et les nombreuses actions menées par le CVCU.

Cet heureux mariage entre patrimoine scientifique, recherche, formation et vulgarisation scientifique préfigure les projets futurs de PALEVOPRIM et du CVCU, qui s’articuleront autour d’un concept : l’histoire de la biodiversité explique la présence de l’humanité sur Terre tout en constituant une des clefs pour élaborer les réponses aux enjeux environnementaux qui menacent aujourd’hui cette présence.

Contact presse

Jean-Renaud Boisserie, directeur de recherche au CNRS, porteur du projet et correspondant communication de l’UMR PALEVOPRIM.

Géraldine Garcia, maîtresse de conférences de l’Université de Poitiers, responsable Centre de Valorisation des collections scientifiques de l’Université de Poitiers (CVCU), chargée de mission communication à l’UFR SFA et correspondante communication de l’UMR PALEVOPRIM.

Gildas Merceron, directeur de recherche au CNRS, directeur de l’UMR PALEVOPRIM